Complicate Your Life with Violence répond à des questions intemporelles avec une franchise assassine : quand faut-il se battre ou fuir, à quoi ressemble le bon sens dans un monde malade, comment conserver sa dignité au milieu de toute cette corruption, et pourquoi l’union d’un producteur et d’un MC produit-elle toujours la meilleure musique ? Les antihéros complexes au centre de cette tempête de grêle sont Jeremiah Jae et L’Orange, le demi-dieu du rap fracturé de Chicago et le sampler cubiste de Caroline du Nord. Les suites sont habituellement destinées à être répétitives : un tapis roulant infini de plaisanteries et de concepts répétitifs. Pour ce deuxième album chez Mello Music Group, Jeremiah Jae et L’Orange ont transporté leur musique hors-la-loi existentielle dans un univers tout à fait nouveau. Au cours de cette décennie, L’Orange est passé maître dans l’art du tissage de récits chimériques à partir de fragments de films anciens découpés en morceaux. S’il s’est d’abord tourné vers le piano jazz et les vieux films policiers de série B, il est devenu un adepte de cette capacité à évoquer n’importe quel type d’humeur : orbites spatiales afro-futuristes et fantaisie carnavalesque, mélancolie pluvieuse et boom-bap au garde-à-vous. Quant à Jeremiah Jae, depuis ses débuts sur Brainfeeder de Flying Lotus, il a bâti sa réputation sur une poésie abstraite et des mesures caustiques, le tout enveloppé dans un nuage de brume, d’électricité statique et de haut voltage. Pourtant, c’est peut-être là sa plus belle performance. Il incarne le rôle d’un homme qui tente d’échapper à une vie de criminel mais qui finit par se faire prendre et enrôler dans l’armée. Le cadre historique du disque – raconté à travers des vignettes cinématographiques entrecoupées – sert de toile de fond pour examiner le point de vue du personnage et la « guerre » qui se déroule dans son propre esprit. Le disque a été abordé comme un acteur travaillant sur un film : avec les artistes à la recherche d’inspiration dans les livres, le cinéma et la musique. L’Orange s’est même rasé le crâne et a suivi la routine d’entraînement d’un soldat pour trouver le bon état d’esprit pendant le processus d’écriture et d’enregistrement. Le résultat est proche de la transformation. Sur « Behavior Report », Jae dit à ses proches qu’il sera de retour avant l’aube pendant que L’Orange crée un tourbillon d’instruments étranges qui donne aux auditeurs l’impression que la guerre des mondes va bientôt éclater. « Say It » est un cauchemar au miroir truqué, un appel et une réponse aux griots et aux fantômes de l’antiquité. « Dead Battery » combine des lignes de basse mystérieuses et des percussions pendant que Jae raconte l’histoire de titans qui s’affrontent. Alors que « My Everything Is Bulletproof » montre le rappeur interpolant de vieux vers de Puff Daddy pour invoquer des scénarios dystopiques d’ennemis mortels en attente, le sentiment d’une peur constante qui empiète, et des allusions à Behold A Pale White Horse. Pendant que L’Orange filtre Sergio Leone à travers Madlib. Le duo est soutenu par des virages brillants des génies les plus énigmatiques de l’underground moderne : Chester Watson, Billy Woods, Zeroh et Lojii. Le résultat final est quelque chose qui correspond à peu d’analogies : un disque qui existe dans la poussière déformée de l’histoire mais qui se sent naturellement pertinent à la schizophrénie de l’existence moderne. C’est Jeremiah Jae et L’Orange sur une grande évasion, ne trouvant pas de réponses concrètes mais posant toutes les bonnes questions – un chef-d’œuvre qui peut être interprété d’une douzaine de façons différentes, entrevu à travers la fumée d’un revolver.
- Part One: Introducing An Inconspicuous Man
- Behavior Report
- Say It All
- Dead Battery
- Part Two: Conscription Sentence
- Summer Camp
- Cool Hand (feat. Chester Watson)
- Borrowed Brass (feat. Zeroh & Lojii)
- Part Three: Hero Complex
- My Everything Is Bulletproof
- Clay Pigeons (feat. Billy Woods)
- Devil’s Piano
- Part Four: Last One Left
- After Alley Life
- Ghost Town
- The Light
- Part Five: No Peace For The Peaceful