Les deux frères originaires du plateau du Golan, Hasan et Rami Nakhleh, reviennent avec un son nouveau qui rend hommage aux scènes dancefloor du Moyen-Orient des années 80. Nous sommes en 1980. Vous êtes dans une discothèque de Beyrouth, du Caire ou ailleurs au Moyen-Orient, perdu dans les couleurs et les lumières, submergé par le son des boites à rythmes et des claviers. C’est beau et grisant… mais ce temps est révolu depuis longtemps. Peut-être qu’il n’a jamais été qu’un fantasme. Réel ou non, il servi d’inspiration à Migrant Birds, le nouvel album de TootArd, guidé par des synthétiseurs qui nous emmènent sur le dancefloor, en s’éloignant du blues du désert de leur premier essai Laissez Passer. L’album commence à prendre forme après que le chanteur, guitariste et claviériste Hasan Nakhleh ait fait l’acquisition d’un synthétiseur arabe avec les quarts de ton, appelé PSR-62 Oriental Model, similaire à celui de son enfance. Les années 80 servent de catalyseur, avec leur ambiance festive et scintillante, mais les racines de cette musique sont plus profondes, et remonte à des musiciens comme les claviéristes Magdi al-Husseini et Ihsan Al-Munzer, qui ont été les premiers à introduire des synthétiseurs dans la musique arabe classique, ou Omar Khorshid, pionnier de la guitare électrique. Si Hasan joue du synthétiseur sur chaque piste, il n’oublie pas la guitare ici présente pour renforcer le rythme, tandis que les percussions, à nouveau jouées par son frère Rami Nakhleh, sont un mélange soigneusement composé de machine et de batterie. Sous les rythmes enjoués, une douleur persiste, qui jette son ombre sur les paroles. Le cœur de l’album est une idée simple, la liberté, celle des oiseaux migrateurs qui s’envolent et voyagent. Une pensée naturelle pour les deux frères apatrides. Né sur les hauteurs du Golan, région annexée dans les années 60 par Israël, ils n’ont pas de passeport, seulement un « laissez-passer ». Un sentiment de déracinement parfaitement capturé dans le morceau “Wanderlust” et ses images échappées d’un livre de Kerouac. Dans “Babe”, les pensées d’évasion viennent d’une femme arabe désespérée de fuir la domination de son mari. Les deux morceaux plus lents de l’album, “Ya Ghali” et le majestueux “Remote Love”, évoquent la beauté chaleureuse, celle d’un endroit où l’amour se transforme en mémoire. C’est un autre type de voyage, une libération du passé. Tout au long de Migrant Birds, l’accent est mis sur les chansons, qui ont beaucoup à dire. Un seul morceau est instrumental, l’énigmatique “Stone Heap of the Wild Cat”. C’est le surnom donné à Rujm el-Hiri, un monument en pierre mégalithique sur les hauteurs du Golan, aussi vieux que Stonehenge, près de l’endroit où les frères Nakhlel ont grandi. Bien que fièrement enraciné au Moyen-Orient, Migrant Birds se veut accessible au monde entier. Les morceaux sont moins longs que dans la musique classique arabe, il y a un concept pop qui vient en partie de l’influence libanaise et égyptienne des années 80. Avec Migrant Birds la musique de TootArd est libre de s’envoler où bon lui semble.

  1. Moonlight
  2. Emotional Twist
  3. Open Sesame
  4. Wanderlust
  5. Trouble Watan
  6. Pretty Woman
  7. Kiss
  8. Babe
  9. Ya Ghali
  10. Red Sea Disco
  11. Stone Heap Of The Wild Cat
  12. Remote Love

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