Joyfultalk revient avec son troisième album pour Constellation ; une nouvelle approche stylistique vibrante et divergente de la matérialité et de la sensibilité analogiques du compositeur et producteur électronique Jay Crocker, dont les deux précédents disques ont forgé une subtilité polyrythmique propice à la transe, chacun sous un angle et une palette sonore distincts, chacun faisant appel à un seul collaborateur instrumental. Cette fois, Familiar Science rassemble les contributions d’un plus grand nombre de musiciens dans une formation libre et cosmique, toujours imprégnée de la cinétique singulière de la table de mixage de Joyfultalk mais plongeeant dans un jazz noueux et tordu. Jay s’inspire de la musique M-Base des années 80 et de la période funk harmolodique d’Ornette Coleman, tandis que son propre passé de guitariste d’impro refait également surface pour la première fois depuis plus d’une décennie. Dans Familiar Science, Jay se replie sur lui-même, plongé dans son kaléidoscope actuel de pratiques artistiques et musicales solitaires dans la campagne canadienne, tout en faisant appel à son ancienne vie de collaborateur de jazz très actif à Calgary, en Alberta. À partir d’une batterie acoustique samplée, il a extrait des textures sonores et rythmiques supplémentaires, puis a formé la base de chaque chanson à l’aide d’enregistrements d’archives exhumés et de sa propre basse, de son clavier et de son séquenceur MIDI.  Les percussionnistes canadiens Eric Hamelin (Ghostkeeper, Chad Vangaalen) et Chris Dadge (Lab Coast, Alvvays) ont fourni des pistes de batterie improvisées à découper et à récolter ; Nicola Miller (Ryan Driver, Doug Tielli) a posé des excursions resplendissantes au saxophone et à la flûte ; le jeu de guitare habile de Jay apparaît sur plusieurs morceaux. Familiar Science comporte également des samples poignants d’enregistrements en direct du regretté saxophoniste iconoclaste de Calgary Dan Meichel qui catalysent certaines des contorsions les plus lourdes de l’album. Jay Crocker tisse toutes ces matières premières dans des compositions exubérantes qui brouillent la ligne entre le combo physique grésillant et les jams futuristes sample-déliques, évoquant diversement Flying Lotus, Tortoise, BADBADNOTGOOD et Music Is Rotted One Note de Squarepusher. L’hyper-compression caoutchouteuse du boom-bap d’ouverture “Body Stone” lance la session, et l’album offre par la suite une panoplie de grooves scintillants et de chemins mélodiques ascendants. Le chant sans paroles de Jay est la sauce secrète de plusieurs morceaux, et son jeu de guitare (proche des progressions de Mary Halvorson ou Jeff Parker) est présent sur “Take It To The Grave”, “Stop Freaking Out” et le titre éponyme de l’album. Des passages plus mielleux sur des chansons comme “Blissed For A Minute” et “Ballad In 9” sont centrés sur le saxophone et la flûte en apésanteur de Nicola Miller. Familiar Science est un festin réjouissant d’avant-jazz électronique polychrome teinté de noise : des compositions richement harmolodiques qui fourmillent de textures et de turbulences croisées ; exploratoires, exaltées et vraiment joyeuses.

  1. Body Stone
  2. Take It To The Grave
  3. Particle Riot
  4. Familiar Science
  5. Ballad In 9
  6. Blissed For A Minute
  7. Hagiography
  8. Stop Freaking Out!
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